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Le bébé de Jules est charmant

Le vendredi 5 avril 2024, par Michel Guironnet

Une simple carte de vœux fait ressurgir toute une tranche de vie, entre la fin du XIXe siècle et les premières années du XXe siècle, dans un village rural des bords du Rhône.

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Saint Clair du Rhône, l’église
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La carte de Marie à...

« St Clair, 7 janvier 1905
Chère Amie, je pense que ma cousine vous écrit. Je ne l’ai pas encore vu aujourd’hui. Je vous envoie un petit souvenir de St Clair. Et je souhaite que Dieu vous soulage dans vos souffrances. Présentez mes souhaits de bonne année à Monsieur le curé.
Dans quelque temps, je vous écrirai plus longuement. J’ai eu de grands ennuis. Grâce à Dieu, tout va un peu mieux, santé et commerce. Si Dieu me prête quelques années de vie, j’espère à un bon résultat.
Agréez, chère Marie, le souvenir et amitiés sincères ; mes respects à Mr le curé. Tout à vous de cœur.
Marie Rivière. Le bébé de Jules est charmant. »

Marie, épicière au village

En 1905, Marie Rivière habite à Saint Clair du Rhône, au quartier du Gabion, au centre de ce village rural de 530 habitants à 12 kms de Vienne, en Isère, au bord du Rhône. Elle est recensée en 1906 comme « épicière » , native des Roches de Condrieu, le village voisin. Elle y est née le 7 octobre 1849, fille d’Etienne Rivière ; tailleur d’habits ; et de Françoise Piaton [1].

Le « Jules » dont le bébé est charmant est très probablement Pierre Jules Piaton, son voisin cultivateur [2]. « Emile François Joseph Aimé », son garçon, est né le 21 septembre 1901. Victorine, son épouse [3], a accouché au domicile conjugal. Ils se sont mariés à Saint Clair le 2 février 1884. Un de leurs témoins est le négociant des Roches Auguste Devirieux, 43 ans.

Marie dit que sa santé et son commerce vont « un peu mieux ». Elle tient ce dernier depuis bien longtemps déjà…et elle a 55 ans passés. Dieu lui accordera-t-il encore « quelques années de vie » ?

Marie Rivière décède célibataire à Saint Clair le 20 mai 1916. C’est son neveu, François Devirieux "secrétaire de la mairie, domicilié aux Roches" , 45 ans, qui déclare son décès. Elle est inhumée au cimetière de Saint Clair, aux côtés de sa mère Françoise Rivière, née Piaton.
Elle laisse pour seule héritière sa sœur aînée Marie Louise Rivière, veuve d’Auguste Devirieux, demeurant aux Roches.

Marie Louise Rivière est née le 9 juillet 1845 aux Roches. Dans son acte de mariage à St Clair le 8 novembre 1869, sa mère est dite veuve, « profession d’épicière à Saint Clair ». Son époux Etienne Rivière est décédé à 33 ans aux Roches le 23 juillet 1850.

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Priez pour elle
Françoise Piaton, « marchande épicière » meurt à 54 ans le 2 mai 1874 « dans son domicile » à St Clair. Inscrite sur le cœur accroché sur la croix de sa tombe, cette épitaphe : "Elle fut le modèle des mères de famille"

Auguste Devirieux, né le 5 juillet 1840 à St Prim, est tonnelier. Domicilié aux Roches, il est assisté pour son mariage par son oncle Auguste Dechenaud. Ses deux parents sont morts : Jean François Devirieux, son père, meurt à Pont Evêque le 23 mars 1865 [4]. Le père d’Auguste Devirieux travaillait aux Forges de Pont Evêque. Marguerite Taret, sa mère, est morte à Vienne, au quartier de Coupe-Jarret, le 4 janvier 1857. Elle est originaire de Chonas.
Les époux Devirieux auront deux enfants nés aux Roches : François Etienne le 25 mai 1870 et Louis le 17 juin 1874. En 1901, le couple habite aux Roches rue de l’église [5].

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Avis de décès Auguste Devirieux
"Journal de Vienne" du 7 octobre 1911
Auguste Devirieux, marchand de vins, après avoir été longtemps adjoint au maire au conseil municipal des Roches de Condrieu, est élu maire de la commune en mai 1900 et le reste jusqu’à son décès en octobre 1911.

Un nouvel épicier au village

L’épicerie est vendue en juin 1916 « à Mr Revon de Chasse » [6].

L’acheteur doit être lié aux nombreux Revon de Saint Clair et des Roches de Condrieu. Habitant Chasse sur Rhône, important nœud ferroviaire, mon intuition me dit qu’il pourrait être employé au chemin de fer du P.L.M. L’acte de vente devrait nous en apprendre plus.
Les minutes du notaire Mathian n’étant pas déposées aux archives de l’Isère ; je demande la copie aux successeurs de l’étude à Chonas. Dans l’heure qui suit, elle m’envoie les trois pages de cet acte !

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Extrait de la première page de l’acte de vente

En voici l’essentiel
"Par devant Me Emile René Mathian, notaire à Chonas, .../...a comparu Madame Rivière Marie-Louise, veuve de M. Auguste Devirieux, propriétaire demeurant aux Roches de Condrieu,
laquelle...a ici vendu à M. Revon Jean Pierre, employé au chemin de fer, demeurant à Chasse, ici présent et acquérant ;
une maison d’habitation, située au village de St Clair du Rhône, canton de Roussillon, avec toutes ses aisances et dépendances ; joignant au Nord Levet, au Levant (Est) Monot, au midi (Sud) chemin public, et au couchant (Ouest) route de St Clair du Rhône à St Prim.
.../...
Cet immeuble dépend de la succession de Mademoiselle Rivière Marie, de son vivant célibataire, négociante, demeurant à St Clair du Rhône, où elle est décédée le vingt mai mil neuf cent seize, sans ascendant, ni descendant, laissant pour sa seule héritière de droit Madame Veuve Auguste Devirieux, sa sœur ici comparante .../...
Mademoiselle en était propriétaire comme lui ayant été attribuée sous le numéro un du lot, second en ordre, à elle échu dans un acte du trois novembre mil huit cent soixante-seize, reçu par Me Denolly, notaire à St Alban du Rhône, contenant le partage de succession de Rivière Etienne et de Françoise Piaton, ses père et mère décédés.
.../...
Cette vente est consentie et acceptée moyennant le prix de mille francs que l’acquéreur s’oblige à payer à la venderesse dans quatre ans, avec intérêts à quatre pour cent l’an, exigible chaque année, le tout à partir du premier juillet mil neuf cent seize et à Chonas, en l’étude de Me Mathian, notaire."

Jean Pierre Revon est né à Saint Clair le 1er août 1883, fils d’Antoine Revon et de Jeanne Roux. C’est donc le frère aîné du Poilu Jules Revon dont nous avons conté l’histoire. Il s’est marié le 12 février 1907 à Saint Clair avec Marie Louise Monot, née à St Clair le 20 février 1884, fille de Pierre Monot et Marie Louise Grubis [7].

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Fiche PLM de Jean Pierre Revon (extrait)
Renseignements sur Jean Pierre Revon tirés de sa fiche P.L.M [8] Matricule N° 45641 Service Voie et Bâtiments

  • Service militaire au 96e de Ligne du 14 septembre 1904 au 23 septembre 1905, « renvoyé dans ses foyers comme aîné de 7 enfants »
  • Entré au Chemin de Fer le 1er janvier 1906 en qualité de journalier, aux Roches de Condrieu, à 3 francs 50 par jour
  • 1er mars 1907, nommé poseur à 100 francs d’appointements par mois, réside à Chasse
  • 1er avril 1919, réside à St Clair du Rhône
  • 1er janvier 1919, cantonnier



« Punitions et gratifications »
« Novembre 1907, zèle et dévouement déployés lors des inondations des 8 et 9 octobre »
« Août 1908, zèle et dévouement aux travaux d’agrandissement de la gare de Chasse »
« Mars 1912, pour avoir arrêté un individu ayant commis un acte de malveillance »

A qui Marie Rivière écrit-elle ?

Sa correspondante est sa « chère amie » et se prénomme Marie. Un peu maigre comme indices !
Elle lui envoie cette carte de l’église, tout à côté de chez elle, comme « un petit souvenir de Saint Clair ». Elle pense que « sa cousine » lui écrit aussi. Il s’agit peut être de sa voisine Victorine Piaton, alliée comme elle aux Piaton par de multiples rameaux.

Nul doute que l’inconnue Marie ait habité Saint Clair et ait gardé des contacts sur place. Par cette carte, « notre épicière » lui demande de présenter ses souhaits de bonne année et ses respects « à Monsieur le Curé ». Cette Marie, encore à identifier, doit pouvoir le dire facilement à ce curé qu’elle doit connaitre. Et que Marie Rivière connait aussi.

Tentons une hypothèse : Jean Baptiste Rabilloud a été curé de Saint Clair de 1888 à 1899, remplacé par Benoit Chaduc. Marie Rivière, très croyante et certainement fidèle paroissienne, l’a bien connu. A l’époque, il emploie pour la cuisine et autres tâches ménagères sa « cousine » Marie Rabilloud. Celle-ci suit le curé Rabilloud dans sa nouvelle paroisse, à Meylan, non loin de Grenoble.
D’après les recensements de Meylan en 1901 et 1906, elle est née en 1846 à Badinières. En fait, elle est née au hameau des Trollières aux Eparres, le 31 août 1846. Ce hameau est détaché des Eparres en 1857 pour créer la commune de Badinières. Elle est la fille de François Rabilloud, tailleur d’habits, et de Félicienne Guivier [9].

Marie Rabilloud est de trois ans seulement l’aînée de Marie Rivière. Et lorsqu’elles échangent sur leurs soucis de santé, à plus de 55 ans toutes deux, il n’y a rien de bien étonnant.


[1Ils se sont mariés à Saint Clair le 2 octobre 1843. Etienne est né le 5 décembre 1818 à St Maurice l’Exil. Il est le fils d’Etienne Rivière et d’Anne Piaton. Françoise est née le 19 septembre 1821 à St Clair. Elle est la fille de Pierre Piaton et de Marie Anne Morin, son acte de naissance dit Louis Piaton et Magdeleine Morin.

[2Né le 19 mars 1859 à St Clair, fils de Pierre Piaton et Agathe Clément.

[3Marie Victorine née le 21 février 1861 à St Clair, fille d’Antoine Piaton et de Marie Sablière.

[4En fait à Estrablin « section de Pont Evêque ». La commune ne sera créée qu’en 1867.

[5C’est l’actuelle rue Victor Hugo.

[6Voir les avis parus dans le « Moniteur Viennois » des 15 et 22 juillet 1916

[7Jean Pierre Revon décède à Condrieu le 16 février 1962. Son épouse décède à St Egrève le 7 mai 1964.

[8Fiche consultable sur :
https://recherche-anmt.culture.gouv.fr/ark:/60879/1851857/dao/0/1?id=https%3A%2F%2Frecherche-anmt.culture.gouv.fr%2Fark%3A%2F60879%2F1851857%2Fcanvas%2F0%2F1
Archives nationales du Monde du Travail – Cheminots et Personnels des Chemins de Fer

[9Mariés à Tramolé le 28 juin 1827.

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