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Un grave accident de voiture… en 1886 !

Le vendredi 14 novembre 2025, par Michel Guironnet

Cet article du « Progrès du Midi » du 29 avril 1886 m’a bien intrigué et suscité de nombreuses questions.
« Un terrible accident est arrivé hier, près de St Prim ». Saint Prim est un « village situé à 12 kilomètres de Vienne, en Isère. »

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"Progrès du Midi"
29 avril 1886 (Source : Gallica)

Cet article est reproduit à l’identique dans « Le Moniteur Viennois » et « L’Impartial Dauphinois » du vendredi 30 avril 1886.

« Le Sieur Rival, concierge à l’usine de MM. Bouvier frères… » Cette importante fabrique de draps est installée rue des Gargattes à Vienne [1]. M Rival doit loger sur place. Qui est-il ? Quel âge a-t-il ?

"La fondation de la maison Bouvier Frères remonte à 1853 ; ces Messieurs avaient succédé à leur père, qui avait été lui-même fabricant de draps pendant 25 ans.
La magnifique usine des Gargattes, située sur les bords du Rhône, bâtie en briques et en fer, a été construite sur les meilleurs modèles d’Angleterre et de Belgique ; elle est mise en mouvement par une machine à vapeur de la force de 150 chevaux, sortie des ateliers de MM. Farcot et Fils. Cette usine modèle réunit dans la même enceinte, toutes les opérations de la Fabrication, depuis le triage des laines, jusqu’à l’apprêt des draps.
MM. Bouvier Frères [2]ont fait de nombreuses inventions, améliorations et découvertes ; on peut citer notamment la machine à velouter qui a fait faire un progrès sérieux à l’apprêt des étoffes feutrées…/…C’est dans l’usine des Gargattes qu’a fonctionné, pratiquement, en 1868, le premier atelier de tissage mécanique, nouveauté qui ait été établi en France.
MM. Bouvier Frères ont été aussi les premiers à employer le colon mélangé à des laines de peu de valeur, pendant l’opération du cardage, dans le but de donner au fil plus de résistance et, par conséquent, plus de solidité aux étoffes de bas prix."
Extrait du « Moniteur Viennois » du 24 février 1893.
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La sortie de l’usine Bouvier
CP sur Internet

Bien des questions !

Rival « se rendait en voiture avec sa famille chez ses amis » ce qui laisse supposer qu’il allait de Vienne à Saint Prim, probablement par la « Grand’Route » la fameuse « Nationale 7 » chantée par Charles Trenet.
« Arrivant à une descente rapide »  ? Bizarre : c’est plutôt une forte montée dans ce sens de circulation : celle justement appelée « la Montée du Grand Pavé », pour accéder au plateau de Chonas l’Amballan.
« La voiture fut entrainée et se brisa contre un mur bordant la route » « Mme Rival et sa fille qui voulurent sauter à bas de la voiture, reçurent des blessures très graves. » Qui est Mme Rival, comment s‘appelle sa fille et quels âges ont-elles ?
« Trois autres personnes furent également contusionnées. » : qui sont ces trois blessés légers ? « Quant à M. Rival qui était resté dans la voiture, il n’eut aucun mal. »

Il y avait donc six passagers à bord de cette voiture. Un modèle familial…de quelle marque ?
N’oublions pas que nous sommes au début de 1886 : les « voitures automobiles à pétrole » sont encore à l’état de prototypes et loin d’équiper une modeste famille Viennoise.

Un article du « Journal de Vienne et de l’Isère » du dimanche 2 mai 1886 apporte d’utiles précisions.

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"Journal de Vienne"
2 mai 1886

En fait, la cause de l’accident est que « le cheval conduit par Mr Rival prit peur et partit à fond de train. » C’est donc une voiture « hippomobile » et non une « automobile » Le terme de voiture, à l’époque, est sans ambiguïté !

L’accident a eu lieu « lundi dernier », donc le lundi 26 avril. « Les époux Bugnon et la famille Rival…se rendaient en voiture à leur propriété de Clonas ». Lundi ou le mercredi pour le jour de l’accident ?

Ils étaient à priori cinq passagers : les deux époux Bugnon plus Mr et Mme Rival et leur fille…Mais cet article écrit « les six voyageurs » furent blessés. Avec Mr Rival, ils étaient donc sept !
Ces époux Bugnon sont-ils les amis des Rival chez qui ils se rendaient, comme le dit le premier article ? Si oui, ils étaient déjà avec eux si le deuxième article dit vrai ! Qui a raison ?

Et maintenant, il est question de Clonas [3] : « l’entrée du village » est quand même bien éloignée de Saint Prim. Mais dans ce cas, elle est bien dans une grande descente…
Qui sont ces « époux Bugnon » propriétaires à Clonas ?

La réponse à toutes ces questions.

Après plusieurs pistes infructueuses, je déniche l’acte de naissance à Vienne d’Adrienne Louise Rival, le 12 novembre 1873, fille de Jean Baptiste Rival, 32 ans, et de Marguerite Carra-Gabriel, 36 ans. Il est jardinier, elle est concierge ! Leur fille est née à leur domicile, la veille, « à dix heures du soir, rue des Gargattes » !
Serait-ce lui notre chauffeur ?

Jean Baptiste Rival et Marguerite Carraz se sont mariés à Vienne le 14 avril 1866. Jean Baptiste est né à La Côte Saint André le 24 juillet 1842. Il est « jardinier » domicilié à Vienne. Marguerite Carraz est née à Faramans (Isère) le 7 avril 1836. Elle est « cuisinière » domiciliée à Vienne.
Les témoins de leur mariage sont Joseph Blanchet, pépiniériste de 22 ans ; Alexandre Valant, maréchal ferrant de 24 ans ; André Carraz, cultivateur de 31 ans, « frère de l’épouse » ; Auguste Bugnon, 22 ans, menuisier à Vienne.

Auguste Bugnon, né le 20 avril 1844 à La Côte Saint André, « ouvrier menuisier » à Vienne, se marie le 25 octobre 1865 à Vienne avec Marie Louise Rivat (et non Rival !), née le 26 mai 1844 à La Côte Saint André , « tailleuse » à Vienne. Présent à leur mariage : Jean Baptiste Rivat, 22 ans, jardinier à Vienne, « frère de l’épouse » !

Jean Baptiste et Marguerite Rival ont eu un fils, André, né à Vienne « rue d’Avignon » [4], le 17 octobre 1867. Marguerite est « ménagère » et Jean Baptiste est « jardinier ». André meurt âgé d’un an le 25 octobre 1868 au domicile de ses parents, tous deux jardiniers.

Adrienne Louise, leur fille, 26 ans, se marie le 25 avril 1900 à Vienne avec François Félix Vuagnat, 44 ans, plâtrier peintre né le 2 septembre 1855 à Annemasse. François Félix est divorcé d’Elisabeth Ducamp . Il est domicilié à Vienne, impasse Timon. Adrienne est divorcée de Jean Marie Louis Rabagliati , elle l’avait épousé à Vienne le 15 mai 1895. Elle est domiciliée à Vienne, 7 Cours Brillier.

Son père, Jean Baptiste Rival, 56 ans, est alors « cafetier » ; le « café Rival » est Cours Brillier, à la même adresse qu’Adrienne. Sa mère, Marguerite Carra-Gabriel, est « sans profession ».
Sont présents au mariage : Auguste Bugnon, 56 ans, menuisier à Vienne, « oncle de l’épouse » et Ennemond Caillot, 39 ans, cafetier à Vienne, cousin de l’épouse.

Le 24 octobre 1900 nait à Vienne, au domicile de ses parents 32 Cours Romestang, Marcel François Baptiste Vuagnat. Son père déclare sa naissance le surlendemain en mairie, « en présence de M. Auguste Bugnon », 56 ans, « menuisier demeurant à Vienne ».

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François Félix Vuagnat

Dans la rubrique « Etat-civil de Vienne » de « L’Echo de Vienne » du 6 janvier 1901 est indiqué le décès à Vienne, impasse Timon, de Jean Baptiste Rival, 59 ans.
Il décède le 31 décembre 1900, « propriétaire demeurant à Vienne, époux de Marguerite Carraz ». Il est dit né à Faramans ! Le premier déclarant en mairie le 1er janvier 1901 est Auguste Bugnon, 56 ans, menuisier, « non parent du défunt ».

Dans les recensements de Vienne pour 1901 et 1906 est inscrit « rue du Collège » le couple Auguste Bugnon et Marie Louise Rivat. Ils n’ont pas d’enfant mais héberge Françoise Rival, la belle-sœur d’Auguste, née le 7 janvier 1846 à La Côte Saint André.

Dans la rubrique « Etat-Civil de Vienne » de la presse locale, pour la semaine du 31 décembre 1915 au 6 janvier 1916, est insérée cette ligne dans les décès : « Bugnon Auguste, 71 ans, rue du Collège 6 ».

Le 3 janvier 1916, « Auguste Jean Bugnon…époux de Marie Louise Rivat » meurt à 5 heures du matin « en son domicile rue du Collège, N°6 ». C’est Auguste Rival, 43 ans, « neveu du défunt » , cardeur à Vienne qui déclare son décès.

Dans la rubrique « Etat-Civil de Vienne » de la presse locale, pour la semaine du 14 février au 23 février 1929, est insérée cette ligne dans les décès : « Rival Mme, née Carraz Marguerite, 93 ans, hospice ».

Le 18 février 1929, « Marguerite Carraz…veuve de Jean Baptiste Rival » décède à 93 ans à l’hospice de Vienne. Il est indiqué dans l’acte : « sans profession, rue Victor Hugo N°48 ». Acte dressé le jour même « sur la déclaration de Adrienne Rival, cinquante cinq ans, journalière domiciliée à Vienne, fille de la défunte. ».

Terminons par ce dernier article dans « Le Progrès de Lyon » du 29 avril 1886, déniché après avoir découvert qui étaient les Rival et les Bugnon.

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"Progrès de Lyon"
29 avril 1886 (Source : Gallica)

Il s’agit bien de « Clonas, près de Vienne ». Les deux couples « se rendaient à leur propriété ». Sont-ils locataires ou co-propriétaires de cet endroit (maison, terrain ?) qui reste encore à localiser ?

En tous cas, ils sont sept passagers ce dimanche matin, 25 avril 1886 : « les six voyageurs » éjectés de la voiture et gravement blessés, plus Mr Rival, indemne !
Donc les deux époux Bugnon (tous deux 42 ans), les deux époux Rival (Jean Baptiste 44 ans, Marguerite 50 ans), leur fille Adrienne (13 ans)…mais cela ne fait que 5 personnes ! Il y a deux autres inconnu(e)s. Peut être que Françoise Rival, la belle-sœur, est là ? Mais il nous en manque toujours un !

Dernières questions : comment sont-ils rentrés à Vienne ? Il y a bien une gare à Clonas, aujourd’hui désaffectée. Mais elle n’est ouverte qu’en 1894.

En tous cas, une chose est sûre : le cheval a été tué sur le coup !


[1C’est l’actuelle rue Laurent Florentin, non loin du Champ de Mars.

[2Pierre, Benoit, et Geoffray ; les trois frères Bouvier ; ont créé cette manufacture. Pierre Bouvier meurt le 18 février 1893 à Vienne âgé de 65 ans. Il était marié à Jeanne Marie Pauline Seguin. Benoit Bouvier meurt le 25 mai 1900 à Vienne âgé de 71 ans, veuf de Nathalie Jacquet.

[3Aujourd’hui Clonas sur Varèze.

[4Rue Maréchal Leclerc aujourd’hui.

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12 Messages

  • Un grave accident de voiture… en 1886 ! 19 novembre 11:18, par level magguy

    je me demandais ou voulait en venir notre intervenant sur cette histoire familiale de deux famille qui veulent passer un bon dimanche

    hélas un grave accident du à un cheval qui devait transporter 8 Personnes le pauvre mais c’est la conclusion qui est sublime
    " le cheval est mort !!! lui aussi

    Répondre à ce message

  • Un grave accident de voiture… en 1886 ! 18 novembre 21:54, par possety

    Dans la note 2, il est écrit que Pierre Bouvier avait pour épouse Jeanne Marie Pauline Seguin, serait-elle une descendante de Marc Seguin inventeur de la chaudière tubulaire ?

    Répondre à ce message

    • Un grave accident de voiture… en 1886 ! 19 novembre 18:59, par Michel Guironnet

      Bonsoir,

      Pierre Bouvier a épousé Jeanne Marie Pauline Seguin à Vienne le 22 décembre 1852.
      Celle ci est née le 11 juin 1831 à Vienne. Elle est la fille de Philibert Seguin et de Mariette David.
      Ces derniers n’ont pas de lien de parenté avec Marc Seguin.

      Cordialement.
      Michel Guironnet

      Répondre à ce message

  • Un grave accident de voiture… en 1886 ! 15 novembre 19:57, par FERRÉOL ROBERT

    Connaissant le site habitant pendant plusieurs années à St Maurice l’Exil maison limitrophe de Clonas. Je connais bien les lieux : Clonas et St Prim quoique étant voisines n’ont pas de chemin ou route directe de l’une à l’autre car il faut passer soit par St Clair du Rhône soit par Auberives (future Nationale 7).

    Par St Clair venant de Vienne on peut passer par St Prim mais il n’y a pas de forte descente sur le trajet. Par contre par Auberives, une route à droite conduit à Clonas en passant au fond du vallon où coule la Varèze. Une autre route part sur le plateau suivant après avoir remonté une côte très pentue sur la droite pour aller à Clonas.

    La première descente vers le vallon de la Varèze est particulièrement pentue, un véhicule hippomobile avec 6 personnes particulièrement lourd pour une telle descente. Le village d"’Auberives débute à l’opposé du vallon avec quelques maisons en fond de vallon compte tenu des descriptions faites je suppose que l’accident a pu avoir lieu dans cette descente.

    Les approximations sont les suivantes :

    • on passe en venant de Vienne sur un débordement de la commune de St Prim,
    • l’arrivée sur Auberives a pu être ignoré car rien ne la matérialise(à l’époque)
    • la commune de Clonas peut être la destination (en particulier pour des propriétés bourgeoises sur le bas de la commune (d’où le choix d’un itinéraire sans trop de montée sur la fin du parcours.

    Précision supplémentaire l’accident sur la Nationale 7 d’aujourd’hui préfigurerait de nombreux accidents de camions en bas de cette côte.

    C’est peut être de ma part un petit témoignage d’automobiliste du 21e siècle.

    Témoignage contre témoignage : je cherche à comprendre ce qui a pu arriver à une ancêtre Crozier Colette de Givors, décédée le 16 février 1858 et sa fille Vernay Antoinette le lendemain ???? Elles habitaient sur les quais du Rhône déclarations faites par le commissaire de police ?????

    Répondre à ce message

    • Un grave accident de voiture… en 1886 ! 15 novembre 20:44, par Michel Guironnet

      Merci pour vos précisions sur les lieux probables de cet accident.
      Hormis dénicher un PV de gendarmerie ou un témoignage direct, il faut se contenter des approximations des journaux !

      Au sujet de votre recherche sur le décès de Colette Crozier suivi de celui de sa fille à Givors, je note que cette dernière n’a que 4 mois et demi ; née le 8 octobre 1857.
      Peut être que la mère et la fille sont mortes de mort naturelle, suite de couches mal soignée, enfant faible à la naissance...
      Le commissaire de police n’est là que pour constater les décès. A mon avis, ce n’est pas pour ouvrir une enquête.

      Cordialement.
      Michel Guironnet

      Répondre à ce message

      • Un grave accident de voiture… en 1886 ! 16 novembre 14:31, par FERRÉOL ROBERT

        Merci pour cette analyse, qui était un peu une de mes hypothèses. J’ai supposé aussi une intoxication au gaz de ville mal géré à l’époque ou au monoxyde de carbone. Je ne sais pas quelle piste pourrait confirmer, les innondations par le Rhône n’étant pas signalées à cees dates

        Répondre à ce message

  • Un grave accident de voiture… en 1886 ! 15 novembre 17:31, par HAUCHARD DIDIER

    Bonjour Michel
    Magnifique, que du plaisir de découvrir une si belle enquête.
    Cordialement
    Didier

    Répondre à ce message

  • Un grave accident de voiture… en 1886 ! 14 novembre 15:02, par Mercurol

    Grands mercis pour cette nouvelle enquête dauphinoise résolue avec maestria !

    Répondre à ce message

  • Un grave accident de voiture… en 1886 ! 14 novembre 11:16, par Pierrick Chuto

    Bravo à notre Sherlock Guironnet. Voila une affaire rondement menée !

    Répondre à ce message

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