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La mort de l’étameur

Le jeudi 21 avril 2011, par Michel Guironnet

Georges J. Arnaud a écrit "L’étameur des morts". Plus modestement, je viens de rédiger "la mort de l’étameur" à partir d’un acte de décès retrouvé dans les registres de Condrieu.

« Le vingt un février mil huit cent soixante treize, trois heures du soir, devant nous Jean Louis Théodore Deshayes, maire de la ville de Condrieu, officier de l’état civil ; se sont présentés : Fabien Pavis âgé de quarante huit ans, étameur, et Jacques Bajard, âgé de vingt neuf ans, cordonnier ; tous deux domiciliés à Condrieu ;

Lesquels nous ont déclaré que Cyr Limpalaire, âgé de quarante cinq ans, étameur, né à Romaingol (Morbihan), domicilié à Condrieu, quartier de la Maladière, célibataire, fils de François Limpalaire, marchand domicilié à Vannes (Morbihan) et de mère inconnue ; est décédé à l’hospice de cette ville aujourd’hui à midi.

Après nous être assuré de ce décès, nous avons dressé le présent acte que les déclarants ont signé avec nous, après leur en avoir donné lecture. Pavis, Bajard, Deshayes ».

« Romaingol » est en fait Remungol, dans le Morbihan, à huit kms au nord de Locminé.

Cyr Limpalaire meurt âgé de 45 ans « à l’hospice » ; autrement dit à l’hôpital de Condrieu, petite ville au bord du Rhône ; bien loin de sa Bretagne natale. Il serait donc né vers 1828 d’un François et d’une « mère inconnue » Dans ce cas, c’est probable, le nom et le prénom de la mère de Cyr n’étaient pas connus des déclarants en mairie.

Les tables décennales de Remungol, entre 1823 et 1843, disponible sur Internet ne nous livrent aucune naissance avec ce prénom. Par contre, on note d’autres naissances d’enfants Limpalaire…entre autres, un « Quéric Limpalaire » né le 4 décembre 1827.

Reste à vérifier si ce sont les enfants d’un François. Nous aurions ainsi le nom de la mère… Peut être s’appelle t’elle Julienne Bohec car un « Cosme Lemplair » naît le 17 juillet 1836, « fils de François et de Julienne Bohec ».

Malheureusement, pour l’instant, les registres de l’état civil du village ne sont pas encore en ligne.

Cyr, comme le premier témoin, est « étameur »

« A rétamer casseroles, chaudrons ! Avez-vous des cuillers à fondre, mesdames ? »

Telles sont les paroles qu’on entend parfois dans les rues des villes et des villages prononcées par un homme souvent fort embarrassé, chargé d’une quantité d’ustensiles de toutes sortes, et souvent d’outils plus ou moins encombrants.

Cet homme est le rétameur qui fera briller en un clin d’œil les casseroles les plus rouillées, les plus sales, les plus dégoûtantes, peut être ; qui tirera des cuillers de vieux plats en étain hors d’usage depuis des siècles.

Ce sera encore lui qui bouchera les trous d’une cafetière en fer-blanc ou en fer-battu, laissant couler le liquide qu’on met dedans.C’est qu’un grand nombre de casseroles sont en fer, et par conséquent susceptibles de se rouiller, ce qu’il faut empêcher, car autrement elles ne seraient jamais propres. Les recouvrirons-nous d’une couche de peinture, comme la grille de la cour ? Non, mais d’une mince couche d’étain. Nous aurons alors du fer étamé ou fer-blanc.

On fait avec le fer-blanc non seulement des casseroles, mais une foule d’autres objets, tels que boites au lait, seaux, plats, couverts, arrosoirs, etc.

Les ustensiles de cuisine qui sont en cuivre se rétament comme ceux en fer.
L’étain s’usant vite, on doit recourir de temps à autre à l’étamage. Ce travail consiste à étendre de l’étain fondu sur la casserole à l’aide d’un tampon d’étoupe. Pour que l’opération réussisse bien, l’objet à étamer doit être à la fois très propre et chaud.

L’ouvrier qui étame les ustensiles de cuisine est cet étameur de qui nous venons de parler.

Si c’est un rétameur qui parcourt la campagne pour exercer son métier, on l’appelle rétameur ambulant. Il s’installe en plein air et remet pour ainsi dire à neuf les ustensiles de cuisine plus ou moins propres, plus ou moins rouillés »

Extrait de « Leçons de choses » pour la classe de première année préparatoire des lycées et collèges, ouvrage d’A. Barrot, professeur au lycée Montaigne, publié en 1904.

« Vous avez remarqué, mes enfants, avec quel soin votre mère écure ses ustensiles de cuisine en cuivre. C’est que le vert-de-gris est un violent poison. Mais on a trouvé le moyen de rendre ces ustensiles inoffensifs en recouvrant leur intérieur d’une mince couche d’étain…

Regardez l’étameur quand il s’arrête sur la place du village. Sur un feu de braise ardent, il place un chaudron en fer où il jette des morceaux d’étain qui fondent bientôt. Il nettoie au sable l’intérieur des casseroles de cuivre qu’on lui a confiées, et les chauffe.

Alors, avec une cuiller de fer, il y verse un peu d’étain liquide et enduit tout l’intérieur avec un tampon d’étoupes ; il rejette l’excèdent. L’étain refroidit, redevient solide ; la casserole est pour ainsi dire doublée d’étain, elle est étamée ».

Extrait de « Les sciences physiques et naturelles (leçon de choses) » par J. Dutilleul et E. Ramé (Larousse 1919) livre pour l’enseignement primaire, cours préparatoire et élémentaire.

Extrait du « Magasin pittoresque » sous la direction d’Edouard Charton (1871).

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17 Messages

  • La mort de l’étameur 21 avril 2011 19:54, par Jean Marie

    Un très bel article. Merci à Michel Guironnet ! (et à Thierry pour l’édition !)

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  • La mort de l’étameur 22 avril 2011 15:13, par borenard

    C’est encore une activité artisanale pratiquée par certaines familles du voyage qui s’adressent aux restaurateurs utilisant des ustensiles en cuivre en particulier.On peut les voir ,exercer leur art comme décrit dans cette histoire ;et c’est dommage que par crainte d’approcher cette population"nomade" on se prive de connaitre et apprécier des métiers ancestraux.Merci pour cet article.

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  • La mort de l’étameur 23 avril 2011 01:47, par Roger

    Mon arrière grand-père était étameur en Côte d’Or.
    Merci de faire connaître ce métier qui était si utile...

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  • La mort de l’étameur 23 avril 2011 07:11

    merci pour cet article, court et précis, compréhensible de tous
    Annie

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  • La mort de l’étameur 23 avril 2011 09:12, par Colette Boulard

    article concis, tout en étant très intéressant et très clair. les matériaux et métiers sont bien expliqués et montrés. Merci.
    Le fer blanc a aussi été utilisé en zinguerie, notamment sur les toits dont il permettait de réaliser des arêtiers d’un aspect bien différent du zinc : plus doux au regard, plus blanc. Ainsi, bien des clochers de Franche-Comté ont bénéficié de ce matériau qui ne se produit plus guère en France et vaut de ce fait très cher neuf. Il y a une vingtaine d’années, je crois qu’ on pouvait encore l’importer d’Angleterre, mais le plus souvent, à regret, les opérations de restauration devaient prévoir le remplacement des vieux arêtiers en fer blanc totalement usés et irrécupérables par leurs cousins en zinc ou en inox plombé, plus durable que le zinc et qui ne brille pas. Modeste au départ, le fer blanc est devenu un luxe en zinguerie.

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  • La mort de l’étameur 23 avril 2011 09:53, par maury

    Votre article m’a beaucoup intéressé.
    En effet, il se trouve que j’ai fait des recherches dans la partie basque de ma famille.J’ai découvert que celle-ci était en fait en grande partie auvergnate.
    Il semble que certaines localités de haute Auvergne et plus précisement du Cantal, du coté d’Aurillac, Saint Illide, Saint Cernin, s’étaient fait une spécialité du métier de la chaudronnerie dès le 17°siècle. Ces chaudronniers-étameurs itinérants ont, semble-t-il, couvert l’ensemble de la France, poussant jusqu’en Espagne via le pays basque et l’Andorre.
    La revue de la Haute Auvergne a d’ailleurs consacré un certain nombre d’articles à ce phénomène.
    Etes-vous sûr que les personnes dont vous parlez en tant qu’étameurs n’étaient pas d’origine auvergnate ?

    J.L. Maury

    mèle : maury.jeanlouis998 chez orange.fr

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  • La mort de l’étameur 23 avril 2011 12:18, par diane Clavareau

    Très beau texte. Concis, intéressant.
    A quand les "rétameurs" d’objets ou d’ustensiles en plastique ? Cela nous éviterait pas mal de pollution...
    Imaginez un "rétameur" qui vous répare les couverts "jetables" ou les gobelets ou pichets en plastique ! On pourrait ainsi faire des économies et ne plus jeter des plats cassés où les saladiers qu’on n’a plus envie de voir. Le plastique, une matière qui deviendrait noble ! Je ne sais si cela intéresserait les fabricants de ces objets !

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  • La mort de l’étameur 23 avril 2011 15:46, par massoni frederi

    a l’epoque du"teflon" il est bon de se souvenir des"petis metiers qui mettaient tant d’animation dans le centre d’un village ou d’un quartier !!!!! les jeunes ne connaissent que ....les centres commerciaux.... avec d’autres bruits..mais moins poetiques !!!!

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  • La mort de l’étameur 24 avril 2011 06:50, par Micheline Pasquet

    très bel article intéressant sur ce métier qui a été oublié .
    Je suis très à l’écoute des vieux métiers qui nous font réaliser que le moderne,c’est bien mais à l’époque de l’étameur les objets duraient une éternité. Aujourd’hui trop de gaspillage !!
    Merci pour cette redécouverte de ce brave étameur. J’en avais connu un à Neuilly sur Marne qui réparait les bassines et divers objets pendant la guerre avec les moyens du bord.
    Micheline Pasquet

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  • La mort de l’étameur 24 avril 2011 07:47, par Bernard Annic

    Dans cette région de Remungol, j’ai un personnage qui a deux prénoms : tantôt Cyr et tantôt Quéric.

    Quéric devrait être la version bretonne de Cyr.

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  • La mort de l’étameur 26 avril 2011 17:01, par betoutj

    Bonjour,

    Dans les actes de Remungol, à la date du 16 janvier 1809, on trouve le mariage de François Limpalaire et de Hélène Lamour.

    Ils sont les parents d’Anne née le 30 septembre 1831.
    On peut supposer qu’ils sont également les parents de Quéric, devenu Cyr, né le 4 décembre 1827.
    Les actes de 1827 et 1828 étant manquants, on ne peut le certifier.
    Mais c’est cohérent avec l’âge au décès.

    Cordialement

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  • La mort de l’étameur 4 mai 2011 09:42, par breton patrick

    Je suis moi-même issu d’une famille de chaudronniers,étameurs
    dinandiers,et j’ai étamé en temps que professionnel pour des restaurateurs du loir et cher, mais maintenant avec l’hygiène alimentaire et autres ; j’ai du arrêter l’activité il y a bien longtemps ;mais je reste un nostalgique.

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  • La mort de l’étameur 8 juillet 2011 22:22, par l’estamaire des trois pierres

    je suis de la dernière generation des ESTAMAIRES des trois pierres,lugarde ,marchastel ,saint-amandin (15 ).je suis né dans le voyage,toute ma vie j’ai voyagé. mon metier je l’ai aimé ! mon chateau :c’est la roulotte , aujourd’hui je refais le chemin a l’envers ,mon esprit vagabonde sur les places ou les enfants de terre-sainte d’auvergne ont TRIMÉS .
    l’estamaire vous salue bien ! ! !

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    • La mort de l’étameur 25 septembre 2017 23:03, par chadefaux

      Mon père aussi était rétameur je passais toutes mes vacances avec lui allant de villages en villages dans les départements de la Creuse ,Puy de Dôme , Allier il était originaire de Lugarde

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  • La mort de l’étameur 3 octobre 2011 09:52

    Merci pour cette article qui m’aide un peu plus à comprendre ce métier qui était celui de mon arrière grand père et de mon grand père à la BONNEVILLE SUR ITON dans l’EURE dans les années 1910/1920. Est-ce que le métier d’étameur pouvait se pratiquer en usine, je pense à la fonderie des Usines de Navarre qui transformait les métaux non ferreux tels que le laiton, le bronze et le cuivre ?
    Je ne sais rien de mon grand père ou pas grand chose, j’essaie de comprendre son parcours à travers son métier, il a vécu en roulotte et sillonnait les campagnes normandes mais semble-t-il que après 1928. C’est pourquoi je pense que vers 1920 quand il habitait la Bonneville avec sa première femme, il devait peut-être travailler en usine.
    Si quelqu’un à quelques renseignements à me donner, je suis preneuse. Merci

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  • La mort de l’étameur 26 mars 2014 16:48, par AUBERT

    Bonjour,

    On trouve des références aux étameurs dans le théâtre d’ombres chinoises. Ainsi, Séraphin, qui officiait à Versailles aux alentours de la Révolution, dans une saynète intitulée LES CRIEURS DE PARIS, présentait le personnage avec le boniment : À raccommoder saudrons, pots de fers ; à raccommoder tourtières, cazeroles ; rétamer les cuillères, les fourchettes.

    On peut consulter le texte d’origine sur :http://www.archive.org/stream/lesraphindelen00dembuoft#page/10/mode/2up (page de gauche).

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  • La mort de l’étameur 3 janvier 2016 15:13, par Frydman Charles

    Stendhal a peu évoqué les casseroles , une seule occurrence dans la Chartreuse de Parme : des casseroles en cuivre dont le vert de gris provoqua la mort de deux personnes .

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