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La mort du Grenadier Michel Piatton, dit Saint Clair

Le vendredi 17 juin 2022, par Michel Guironnet

La seule certitude est que ce soldat est natif de Saint Clair, village alors appelé « Saint Clair près Condrieu » pour le différencier d’autres Saint Clair en Dauphiné. Quel âge a-t-il lorsqu’il meurt ? De maladie ou de blessures ? Est-il un « vieux soldat » ou un tout jeune enrôlé ? Comment le retrouver ?

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B.M.S de Saint Clair du Rhône, vue 22/137 de la collection communale

« Je soubsigné certifie avoir lu lextrait mortuaire de Michel Piatton dit St Clair, grenadier au régiment des grenadiers de France, compagnie de Chalabre, qui décéda à lhôpital de Nancy en Laurraine le 10e 8bre (octobre) 1768 ; lequel extrait a esté envoyé à son frère Pierre Piatton de St Clair par le Père Cirille, capucin aumônier dudit hôpital. Aubrun, curé » [1]

Cet acte, non daté, est relevé dans le registre paroissial de 1771 de Saint Clair du Rhône, placé entre l’inhumation le 10 septembre d’André Charrin, 35 ans, « domestique à Praille chez Sieur Louis Boudin et Demoiselle Françoise Garin », et l’acte de sépulture du 24 septembre de Marianne Chirouze, 5 ans.

Cet acte doit servir d’attestation au frère du soldat Piatton pour faire enregistrer son décès trois ans plus tard. Peut-être pour des questions d’héritage.
En effet, entre 1768 et 1771, pas d’autre acte ne signale la mort du soldat dans le registre de Saint Clair.

L’acte est bien, par contre, dans les registres de l’hôpital de Nancy :

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Signé par le Père Cyrille capucin aumônier
Nancy (1713-1793) 5 Mi 394/ R100 (vue 194/952)

« Le dix octobre mil sept cent soixante huit est mort dans l’hôpital militaire de Nancy muni des sacremens le nommé Michel Piaton dit St Clair, natif de St Clair, juridiction de Grenoble, grenadier au corps des grenadiers de France, compagnie de Chalabre ; et y entré le onze septembre la même année. F. Cyrille, capucin aumonier »

De 1724 à 1768 : Saint-Louis est le 3e hôpital de Nancy ; largement utilisé pendant la guerre de Succession d’Autriche et la guerre de Sept-ans. Il était situé place de Grève, soit approximativement à la place d’immeubles de la rue Stanislas, entre la Bibliothèque municipale et la place Carnot. [2]

Les aumôniers de cet hôpital sont des "frères mineurs capucins". Du 16 septembre 1764 au 13 octobre 1775, le Frère Cyrille signe de nombreux actes de décès de soldats originaires de toute la France. Beaucoup sont Grenadiers au Corps des Grenadiers de France. Chacun porte un « nom de guerre », surnom souvent très savoureux : dit La Grandeur, Pied ferme, La Douceur, La Joye, La Réjouissance...

La Compagnie de Chalabre

Le Corps des Grenadiers de France est créé le 15 février 1749. A l’origine, il est composé de quatre brigades de douze compagnies. Une compagnie regroupe 45 Grenadiers, et par la suite 52 hommes.
Chaque compagnie porte le nom du Capitaine qui la commande : c’est le cas "de la compagnie de Chalabre" dont fait partie Michel Piatton. Il doit s’agir de Louis Gabriel, Comte de Chalabre, qui « a passé en 1767 à une compagnie de grenadiers de France » comme le note le « Calendrier des princes et de la noblesse de France…pour l’année 1769 » [3]

Qui est Michel Piaton ?

La seule certitude est qu’il est natif de Saint Clair, village appelé à l’époque « Saint Clair près Condrieu » pour le différencier d’autres Saint Clair en Dauphiné. Quel âge a-t-il lorsqu’il meurt (de maladie, de blessures ?) en Lorraine ? Est-il un « vieux soldat » ou un tout jeune enrôlé ?

Comment le retrouver ? Il existe les registres tenus pour « les contrôles de troupes de l’Ancien Régime », registres magistralement étudiés par André Corvisier dans son ouvrage qui fait référence. Il faut lire au moins l’introduction qu’il consacre à son travail « d’historien et d’archiviste ».
Dans le tome 2 de son monumental ouvrage, il indique que cette compagnie faisait partie de la 3e brigade [4]
Sur « Mémoire des Hommes », certains de ces registres ont été numérisés et mis en ligne :

Sous la cote GR 1 Yc 377 est effectivement répertorié le Corps des Grenadiers de France.
La vue 145/216 est une page de présentation de la 3e brigade :

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« Registre de 12 cahiers de 20 feuillets chacun pour servir à l’enregistrement des noms des Grenadiers qui composent la 3e Brigade du Corps des Grenadiers de France, Compagnie par Compagnie, avec leurs signalemens et la date de leur entrée dans cette Brigade. Fait à Nancy le 21 juillet 1763 »

Sur la vue suivante est dressée la liste des compagnies. La N°8 est celle de « Cerval Chalabre ». A noter que le nom de "Chalabre" a été ajouté, d’une écriture différente, à celui de "Cerval", probablement l’ancien capitaine remplacé par Chalabre en 1767.
La liste de la « Compagnie de Cerval » débute vue 145 avec 9 Grenadiers par page. Vue 147, on trouve la fiche de Michel Piaton :

« Michel Piaton, dit St Clair, fils de Pierre et d’Anne Pin, natif de St Clair, juridiction de Grenoble, âgé de 28 ans, taille de 5 pieds 5 pouces, cheveux et sourcils chatins clair, les yeux gris bleux enfoncés, le visage le menton retroussé » « M 1754 au 1760 Conmin ? »
« Mort à l’hopital de Nancy le 10 8bre 1768 »

Michel Piaton est âgé de 28 ans lorsqu’est rédigé ce « contrôle des troupes » en 1763. Cela laisse supposer qu’il est né en 1735…Ne reste plus qu’à le retrouver dans les registres paroissiaux de Saint Clair !

En janvier 1779 le curé Jean Pierre Aubrun meurt après presque 46 ans à la tête de la paroisse. Les cahiers tenus par ce prêtre pendant ces années sont classés et reliés par son successeur Pierre Clamaron…et un répertoire très précis est établi, année par année, recensant les baptêmes, mariages et sépultures entre le 23 mars 1733 et le 16 janvier 1779 : un formidable outil pour le généalogiste et l’historien local.

En 1735, aucun Michel Piaton n’est inscrit dans le répertoire. Le seul Michel est Michel Tarjon !

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« Le 2e avril 1735 jay baptisé Michel Tarjon fils naturel et légitime a Pierre Tarjon et a Anne Pin… »

Essayons d’y voir plus clair

Dans le registre paroissial de Saint Clair est indiqué le 31 janvier 1719, le mariage de Pierre Piaton et Anne Pin, les parents de notre grenadier. Malheureusement sans aucune filiation [5].

  • Le 16 octobre 1721, à St Clair, nait Pierre, enfant de ce couple. Ce serait lui qui fait transcrire dans le registre en 1771 la mention du décès à Nancy de son frère, le Grenadier Michel Piaton.
  • Le 4 octobre 1723 nait Claudine, baptisée à Saint Clair. Sa marraine est « Claudine Piaton demeurant en Champagniolle, paroisse de Condrieu » C’est-à-dire qu’elle habite le village voisin des Roches, alors annexe paroissiale de Condrieu, de l’autre côté du Rhône.

D’autres naissances sont probables entre 1723 et 1735, celle de Michel Piaton « alias Tarjon »…Mais d’où vient qu’en 1735 le nom de Piaton soit remplacé par ce « surnom » dans son acte de baptême ?


Dans les registres paroissiaux de Saint Alban du Rhône, alors paroisse en titre de Saint Clair son annexe, existe cet acte de baptême :
« L’an de grâce mil six cent septante trois, et le onzième décembre ; je soussigné prêtre et curé de St Clair, parroisse de St Alban du Rosne, ay baptizé lenfant de Me (Messire ?) Antoine Piatton, dit Tergeon, vigneron de St Clair, et d’Anne Levet, mariés…a quy on a donné le nom d’Antoine…lenfant est né le susdit jour au matin et baptizé dans l’église de St Clair…De Brunières »

Antoine Piatton et Anne Levet auront une fille, Marie, baptisée à St Alban le 9 septembre 1675. Dans son acte de baptême, le « dit Tergeon » a disparu !

Antoine, né le 11 décembre 1673, se marie le 30 octobre 1706, à Vienne, paroisse Saint Sévère, avec Louise Renaud (vue 214/262). Ses deux parents sont encore vivants à cette date. C’est peut-être lui qui meurt à 80 ans à St Clair le 18 octobre 1744.

Hasardons-nous à faire une hypothèse, sans aucun indice pour l’étayer et encore moins pour la vérifier :
Pierre Piaton, le père de notre grenadier, marié en 1719 avec Anne Pin, serait né vers 1690 ou 1700. Un Pierre Piaton meurt à St Clair à 63 ans, le 15 janvier 1763. C’est peut-être lui, né (peut-être) du couple Antoine Piaton Anne Levet.
Le « Terjon » aurait alors fait sa réapparition en 1735 au baptême de son fils pour différencier sa lignée d’une autre branche de Piaton, très nombreux dans le village !

Pour en savoir plus sur l’histoire des Grenadiers de France, voir le très riche site...


[1Vue 22/137 de la collection communale ; vue 80/197 du registre du greffe (en ligne sur le site des AD de l’Isère)

[2Information tirée du site : https://www.nancy-focus.com/nancy-hopitaux-militaires

[3Chalabre (Louis-Gabriel-Bruyère, vicomte de), né le 24 août 1736 à Pomarède en Languedoc. Entré au service comme enseigne en 1748. Lieutenant dans Royal La Marine en 1750. Capitaine en 1755. Réformé à la réorganisation de 1763. Replacé en 1763. Abandonne la même année. Capitaine dans les grenadiers de France en 1767. Major du régiment provincial de Montpellier le 4 août 1771. Colonel d’infanterie le 3 mars 1774. Colonel en second du régiment d’Anjou le 18 avril 1776. Mestre de camp commandant le régiment de Limousin le 13 avril 1780. Brigadier le ler janvier 1784. Mort en 1786.
Note (1) page 219 « Carnet de la Sabretache : revue militaire rétrospective / publiée mensuellement par la Société "La Sabretache" (1923) Consultable sur Gallica.

[4Pages 91 et 92, voir N° 262 cote : 1Yc 377

[5Vue 154/157 du registre B.M.S de St Clair 1656-1720.

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