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Le commerce français avec l’Asie avant la Compagnie des Indes Orientales de Colbert

La vie des matelots de la Compagnie des Inde

Le samedi 1er novembre 2003, par Jean-Yves Le Lan

Les marins français paraissent avoir été les premiers en Europe à suivre au-delà du Cap de Bonne Espérance la route tracée par les Portugais. En 1508, le corsaire Pierre de Mandragon est mentionné dans le canal du Mozambique.

En 1526, trois navires tentent de rejoindre " Cathay " (La Chine) et les Moluques par le détroit de Magellan. Cette expédition financée par la banque florentine avec l’appui de François 1er est organisée par le normand Ango avec les frères Verrazani. A la suite d’une tempête les trois navires sont dispersés. Les frères Verrazani explorent alors le Brésil et un seul navire double le cap de Bonne Espérance. Il atteint Sumatra et au retour fait naufrage à Madagascar.

Une année plus tard, des marchands de Rouen, arment le navire La Marie-de-Bon-Secours pour l’Océan Indien. Il est saisi par les portugais à Diu (Comptoir portugais en Inde).

En 1528, les frères Verrazani font un nouvel essai qui est encore un échec. L’année suivante, Jean Arago arme deux navires pour l’Asie : La Pensée et Le Sacre. Ces navires sont conduits par des pilotes portugais et atteignent la côte sud-ouest de Sumatra. Des achats de poivre sont réalisés, mais bien que le voyage soit un succès pour la navigation, il eut de piètres résultats commerciaux. Il n’est plus question de voyage vers l’Asie avant le début du XVIIe siècle.

En 1601, ce sont les malouins associés à des marchands de Vitré et de Laval qui arment deux navires : Le Croissant et Le Corbin. Les deux vaisseaux sont séparés par une tempête au large des Maldives. Le Corbin y sombre tandis que Le Croissant atteint Aceh (Indonésie) en 1602. Le navire est abandonné au retour dans l’Atlantique et la cargaison laissée aux navires flamands qui ont secouru l’équipage (mai 1603).

En 1604 est créé par des négociants de Dieppe assistés d’un capitaine flamand, Gérard Le Roy, une société pour le voyage des Indes Orientales. Ce dernier, co-dirige cette société avec un financier, Antoine Godefroy, trésorier de France à Limoges. Elle porte de le nom de " Compagnie de Le Roy et Godefroy ". Elle reçoit pour quinze ans le monopole royal de navigation dans les Indes. Ses agents acquièrent plusieurs navires et quatre entrent en armement. Mais, en 1609, aucune expédition n’a quitté la France à cause de l’hostilité des Malouins et surtout des Hollandais.

Toutefois en 1611, Gérard Le Roy et Antoine Godefroy demandent au gouvernement de renouveler par anticipation leur privilège. Cette requête est accordée et la Compagnie est confirmée pour une période de douze ans mais ceci n’a pas d’effet concret car comme la première fois, aucune navire ne quitte la France. En 1615, des négociants de Rouen, Jacques Muisson et Ezéchéel Cahen, essaient de monter une compagnie pour les Indes. La reine Marie de Médicis fait fusionner les deux compagnies pour donner naissance à la " Compagnie des Moluques ", constituée par lettres patentes du 2 juillet 1615. Cette dernière a le privilège du commerce avec l’Asie pour dix-huit ans. En 1616, le capitaine Lelièvre de Honfleur, part de ce port avec trois navires et puis deux autres quittent le même port sous le commandement d’Antoine de Beaulieu et du sieur de Netz : le Montmorency et la Marguerite qui atteignent Banton (Java) en 1617. Il y retrouvèrent deux navires malouins. Les Hollandais présents sur les lieux confisquent ou détruisent un navire de chaque expédition. Ces expéditions furent cependant rentables commercialement.

Les premiers résultats concrets du commerce avec l’Asie sont dus à une compagnie créée en 1611 par Charles de Damville, Amiral de France, sous le nom de " Compagnie de Montmorency pour les Indes Orientales ". Son neveu, Henri II de Montmorency, lui succède en 1612 et arme un navire en 1613 puis trois en 1615 à destination des Indes, de la Chine et des îles proches.

L’installation d’un comptoir aurait pu avoir lieu à Pondichéry en 1617 quand le Saint-Louis provenant de Saint-Malo atteint le Coromandel. Jean Pépin obtient du " Nayacq de Pondichéry " l’autorisation de bâtir une forteresse pour assurer la sécurité du commerce français. Il laisse un gardien et promet de revenir bientôt, ce qu’il ne fit pas .

En 1619, Malouins et Compagnie des Moluques s’associent. Augustin Beaulieu repart de Honfleur avec trois navires dont le Montmorency, l’Espérance et l’Ermitage. Il revient avec un seul navire mais avec une cargaison importante. De plus, il crée un comptoir à Sumatra et une patache reste sur place pour réaliser du commerce intra-asiatique juger pour la première fois intéressant par les français. Cette dernière est confisquée par les Hollandais. Dans un mémoire qu’il rédige suite à son voyage, Augustin Beaulieu cite souvent Malacca et le rôle important de ce comptoir portugais dans la région. Après son retour au Havre, en 1622, il faut de nouveau attendre plusieurs décennies pour que les navires français retournent en Asie du sud-est pour faire du commerce.

En mars 1626, Richelieu se fait nommer Grand Maître du commerce puis par l’édit de Saint-Germain (octobre 1626) Grand Maître, chef et Surintendant Général de la Navigation et Commerce de France. Dès son arrivée au pouvoir, en 1624, il crée un conseil de Marine qui est une première tentative pour organiser la navigation du commerce.

De 1622 à 1640, des essais pour trouver une route fluvio-terrestre pour l’Asie via la Perse sont initiés par les capucins du Père Joseph - proche de Richelieu - appuyés par Richelieu mais ils se soldent par des échecs. Seul en 1628, le père Pacifique de Provins réussit à établir des liens directs et officiels entre la Perse et la France ouvrant ainsi la voie de l’Océan Indien, via le Golfe Persique. D’autres liaisons sont établies via la Mer Rouge par d’autres capucins qui sont autant de contacts potentiels en Asie ( Inde, Surate et Madras). C’est ainsi que de la Méditerranée aux mers bordant l’Inde et la péninsule Indochinoise, un ensemble de capucins peuvent aider les français s’intéressant à l’Asie (Missionnaires ou commerçants).

En 1626-1627, Richelieu présente devant l’assemblée des notables un programme économique. Celui-ci, largement approuvé, est matérialisé en 1629 par une ordonnance royale, dite code Michau qui pousse les français vers le commerce international et encourage la création de fortes compagnies de commerce comme celles d’Angleterre (East India Company) et des Pays-Bas (Vereenigde Oost Indische Compagnie).

En 1626 deux compagnies sont lancées :
la " Compagnie des Cent associés de Morbihan " est un projet ambitieux, avec un vaste champ d’action qui comprend la Chine, mais elle est sabotée très rapidement par le parlement de Rennes ;
la " Compagnie de la nacelle de Saint Pierre fleurdelysée " prend la suite sous l’impulsion du Père Joseph mais ,elle aussi, elle est vouée à l’échec.

Elle se transforme en 1627 en " Compagnie du Saint Esprit " sans plus de succès. En 1628, une nouvelle tentative plus modeste est lancée : la " Compagnie des cents associés de la Nouvelle France " mais son privilège est limité au Canada et elle a de faibles résultats.

Au cours de l’année 1626, Richelieu soutient le projet de deux marins, de Roissy (ou Roissey) et Pierre Belain d’Esnambouc : la création de la " Compagnie des seigneurs de Saint Christophe " qui devient en 1635, la " Compagnie des Iles d’Amériques " . Son action s’étend à la Guadeloupe, la Martinique et d’autres îles et est un succès. Le cardinal est l’un des souscripteurs avec d’autres proches Razilly, Effiat, Lauzon... et un des directeurs qui deviendra l’un de ses proches collaborateurs est François Fouquet. Ce dernier s’occupe aussi de la " Compagnie du Sénégal, du Cap vert et de la Gambie " créée aussi en 1626 par des marchands de Dieppe et de Rouen. En 1638 sont crées la " Compagnie du Cap vert " et la " Compagnie du Maroni ". Ces compagnies n’ont pas pour premier objectif le commerce mais plutôt celui de propager la religion catholique. De plus aucune de ces compagnies ne commerce avec l’Asie. Les tentatives terrestres pour atteindre l’Asie par la Perse et par la Méditerranée ayant échoué la France se lance dans l’aventure par la voie maritime du cap de Bonne Espérance.

En 1629-1630, Beaulieu présente un projet avec comme base Madagascar. Une compagnie particulière est montée par des financiers pour explorer les îles à l’est de Madagascar. En 1632, Rigault arrive à Madagascar. En 1635, Gilles de Régimont - qui avait déjà fait une expédition dans l’Océan Indien de 1630 à 1632 - s’associe avec des Dieppois pour visiter le golfe du Bengale. Plusieurs autres expéditions suivent avec Rigault en 1635, 1637 associé à des Dieppois.

En 1638, Goubert explore Rodrigues, les Mascareignes, etc. et en prend possession. En 1642, Richelieu donne privilège, pour dix années, à Gilles de Régimont, au capitaine de marine Rigault et à ses associés dieppois, pour y développer le commerce et la colonisation de Madagascar. Les lettres patentes qui créent la compagnie sont datées du 24 juin 1642, la " Compagnie d’Orient " prend alors naissance. La première expédition a lieu au mois de mars 1643. Le Saint-Louis, capitaine Coquet, quitte à cette date le port de Dieppe avec douze colons et deux " commis " chargés de diriger l’établissement de la colonie. Il s’agit de Pronis et Foucquembourg. Le voyage se déroule dans de bonnes conditions et atteint " l’île Mascareigne " - appelée deux années plus tard Bourbon - dont Pronis prend possession au nom du Roi. La fin ce premier voyage est moins heureux car le Saint-Louis " fit côte ". Un second navire le Saint-Laurent suivit en novembre 1643, sous le commandement de Gilles de Régimont, avec 70 autres colons à son bord. En septembre 1644, un troisième navire, le Royal, capitaine Lormel, part aussi de Dieppe et débarque 90 passagers. Le Saint-Laurent, ayant regagné la France, revient aussitôt avec l’un des principaux actionnaires de la Compagnie, Etienne de Flacourt. La " Compagnie d’Orient " voit son privilège reconduit pour quinze années par lettres patentes du 4 décembre 1652.

Mais, le maréchal de La Meilleraye et Fouquet fils (le surintendant, son père est mort en 1640) veulent jouer leur propre carte, seuls ou en association avec la compagnie. La " Compagnie de La Meilleraye " est créée avec la permission du Roi. Elle arme plusieurs navires pour Madagascar. En 1854, de La Meilleraye envoie deux navires, le Saint-Georges et l’Ours en Océan Indien, sous le commandement du sieur La Forest des Royers. Ensuite les armements sont une suite de catastrophes : en 1658, un navire est saisi par les espagnols ; en 1660, un convoi important est pris par les pirates barbaresques au large de la Mauritanie et Flacourt est tué. La même année, un navire s’échoue au Cap. Fouquet profitant de ces déboires essaye de supplanter de La Meilleraye et envoie une de ses frégates à Madagascar. Fouquet a des ambitions asiatiques et participe peu de temps avant son arrestation à la création d’une compagnie ayant pour but la péninsule Indochinoise.
De 1653 à 1660, l’élan religieux lancé sous l’impulsion d’Alexandre de Rhodes et de la Compagnie du Saint Sacrement - comprenant des capucins, des lazaristes et des dévots - tente d’accroître la population chrétienne en Asie.

En 1660, la " Compagnie de Chine " est fondée. Elle vise à envoyer des missionnaires vers l’Extrême-Orient tout en faisant du commerce. Elle s’appuie sur le savoir faire des membres de la Compagnie du Saint Sacrement et sur celui d’Alexandre de Rhodes qui a vécu pendant trente et un ans en Asie. Il s’agit d’une compagnie pour le commerce avec la Chine, le Tonkin et la Cochinchine. Elle a pour actionnaire des personnalités de toute la haute société de l’époque : Mazarin, Fouquet, plusieurs nobles et officiers de la couronne et des financiers. La plupart sont membres ou proches de la Compagnie du Saint Sacrement.
La " Compagnie de Chine " précède la création de la grande " Compagnie des Indes Orientales " en 1664. Cette nouvelle compagnie reprend la vocation commerciale de la " Compagnie de Chine " mais pas sa vocation religieuse. Elle n’est pas créée par une association de commerçants comme en Angleterre et en Hollande mais par la volonté de l’état sous l’impulsion de Colbert.

Bibliographie

1. Haudrere (Philippe) - La Compagnie Françaises des Indes au XVIII° siècle (1719 - 1795) - Librairie de l’Inde Editeur - 1989.

2. Kroell (Anne) - Les voyages - Dans l’Inde et la France sous la direction de Philippe Le Tréguilly et Monique Morazé - CNRS Editions - Paris 1995.

3. Mantienne (Frédéric) - Les relations politiques et commerciales entre la France et la péninsule Indochinoise (XVIIe siècle) - pages 18 à 52 - Edts Les Indes Savantes - 2001.

4. Sottas (Jules) - Histoire de la Compagnie Royale des Indes Orientales - 1664-1719 - Edts La Découvrance - 1994.

5. Weber (Henry) - La Compagnie française des Indes (1604 - 1875) - Edition Arthur Rousseau - Paris 1904.

6. Weber (Jacques) - La vie quotidienne dans les comptoirs - Dans l’Inde et la France sous la direction de Philippe Le Tréguilly et Monique Morazé - CNRS Editions - Paris 1995.

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