S.T.O. - Service du Travail Obligatoire
Après le volontariat pour travailler en Allemagne durant les années 1940, 1941 et 1942, Laval imagine en juin 1942 la relève :
Trois ouvriers volontaires seront échangés contre un soldat français prisonnier. Malgré les appels multiples de Vichy et la pression du Gauleiter Sauck, ce choix s’avère un échec. En septembre 1942, Laval institue le Service du Travail Obligatoire (STO) en Zone Libre. Mais en novembre, invasion de cette zone par les troupes allemandes - les 26 et 27 la flotte française se saborde à Toulon.
Finie la ligne de démarcation. Janvier 1943, les exigences allemandes se précisent, Sauckel, chargé de recruter la maind’oeuvre en France, réclame 250 000 travailleurs pour l’Allemagne dans les 6 mois à venir : " ... les Français sans emploi, utile aux besoins du Pays". Il n’est plus question de relève mais de travail obligatoire et ... en février 1943 création sur l’ensemble de la France du Service du Travail Obligatoire pour les jeunes des classes 40, 41 et 42. Ce seront "les requis d’office".
Par tous les moyens les jeunes français essaient d’échapper au S.T.O. Trois solutions : se cacher, quitter le pays ou entrer dans la résistance.
Barthélémy dit Mimi (le frère de ma femme) a trouvé une quatrième échappatoire : ses origines espagnoles. Né le 13 octobre 1922 - il a alors 20 ans et 4 mois - il fait valoir aux autorités allemandes sa nationalité espagnole en présentant de faux papiers (il est pourtant français depuis le 18 novembre 1936).
Une nouvelle fois sauvé par nos origines. "Espagnol", sésame idéal envers les autorités allemandes. La cousine Marie-Thérèse Bernat s’en était servi, comme mot de passe pour récupérer le véhicule réquisitionné de son Père.
Moi et Oliver, nous nous en servirons un an plus tard, en février 1944, lorsque nous recevrons à Ancenis du Commissariat Général de la Main-d’œuvre à Nantes cet ordre daté du 21 :
"Monsieur, En exécution de la circulaire 4 C 2 du 9 février 1944, vous êtes prié de vous présenter, le 3 mars à 9h 30, à l’Hôpital Livet, rue Dufour à Nantes, pour y subir une Visite Médicale. Le départ étant fixé le même jour, il est nécessaire que vous vous munissiez de vos bagages. L’inexécution du présent ordre entraînerait l’application des sanctions prévues par la loi".
Alors là, ce n’est pas de la rigolade, pas question de mettre cette lettre sous le coude comme je l’aurais fait d’un vulgaire rappel d’impôt ou d’assurance ou d’une relance fournisseur ; dès le 29 février j’expédie une lettre recommandée au Consulat Général d’Espagne en France :
"Monsieur le Consul Général,
Nous nous permettons de vous transmettre cette lettre afin d’avoir de toute urgence une réponse soit télégraphiquement ou par retour de courrier à seule fin d’être couvert vis à vis des autorités françaises.
« Nous sommes Messieurs Oliver et Mayol, commerçants espagnols, patentés et inscrits dans votre Consulat (certificat de nationalité n° 2575 et 2576], ayant reçu du Commissariat Général de la Main- d’œuvre de Nantes, en date du 21 février 1944, l’avis suivant "En exécution de la ... (précédemment cité)...
Malgré que nous estimons ne pas être concernés par cette convocation, il y a quand même eu des commerçants espagnols à Angers qui ont du partir avec un convoi pour le travail obligatoire.
Nous vous serions très reconnaissants de nous faire parvenir de suite les indications à suivre.
En observant que nous sommes des ressortissants espagnols commerçants patentés dans le commerce des fruits et légumes liés au Service du Ravitaillement Français.
A seule fin d’être couvert pour le 3 mars, veuillez nous faire parvenir de toute urgence une réponse affirmative ... "
La réponse rassurante ne se fait pas attendre.
Dès le 3 mars 1944 le Consul certifie pour tous les deux, qu’étant inscrits sur le Registre des Nationaux de ce Consulat Général nous sommes :
"Exempts de toute réquisition personnelle par les Autorités Etrangères en vertu de la Convention Consulaire conclue entre la France et l’Espagne en date du 7 janvier 1862, actuellement en vigueur (pour cette date voir également le chapitre "Prélèvement Exceptionnel de Lutte contre l’Inflation). L’article 52 de la Convention de La Haye en date du 18 octobre 1907, stipulant que la réquisition des Services pour les besoins de l’Armée d’Occupation (Allemagne) se fera sur la main-d’œuvre de la population indigène des, pays occupés (France), ne fait aucune mention à la main-d’oeuvre d’un pays dont l’exclusion de belligérance est formellement reconnue (Espagne).
De ce fait, le Consulat Général prie les Autorités compétentes (Etat Français) de vouloir bien exempter Monsieur Mayol et Monsieur Oliver de toute réquisition à titre personnel, en raison de sa qualité d’espagnol.
On ne peut-être plus clair... "Les Autorités Compétentes" n’insistent pas…..